Qui est propriétaire des ouvrages construits sur le domaine public portuaire dans l’espace UEMOA ?

Dans de nombreux ports de l’espace UEMOA (Abidjan, Lomé, Cotonou ou San Pedro), cette question est récurrente.

Les autorités portuaires ont des difficultés à répondre à la question posée car elles affirment que du fait de l’héritage du droit colonial, les premiers occupants privatifs des espaces portuaires, titulaires de titres domaniaux de longue durée (30 ou 50 ans) estiment, aujourd’hui, que les ouvrages qu’ils ont construits ne peuvent pas, de manière automatique, s’incorporer gratuitement au domaine public. Ils souhaitent que les autorités portuaires rachètent leurs ouvrages, à l’expiration de leurs titres domaniaux.

Les autorités portuaires considèrent, au contraire, que les ouvrages aménagés appartiennent au propriétaire du sol. Les occupants privatifs n’avaient qu’un droit de superficie sur le domaine public portuaire. Ils n’ont droit à aucune indemnité.

Dès lors, un ouvrage implanté sur le Domaine Public Portuaire (DPP) par un occupant privatif peut-il demeurer une propriété privée ? En Afrique, l’autorisation domaniale étant un mode d’organisation des services publics, n’est-il pas légitime que pour garantir la bonne exécution desdits services, l’autorité portuaire puisse refuser de reconnaître aux occupants, un droit de propriété sur les ouvrages construits dans les ports ?

Le droit positif apporte des éléments de réponse.

Au Togo, l’article 30 du Décret n*2019-008/PR du 06/02/19 fixant les modalités d’occupation du domaine public…précise la règle suivante :  » Quel que soit le motif qui justifie la fin de l’occupation, l’occupant ne peut prétendre à aucune indemnisation et remet, à ses frais les lieux occupés en leur état initial…Toutefois, l’administration peut racheter les installations érigées par l’occupant…. ».

Au Bénin, l’article 27 al.2 du Décret n*2015-016 du 29/01/2015 portant conditions et modalités d’occupation du DP indique que  » l’occupant peut se voir racheter les installations qu’il aura érigées sur le DP à la fin de l’occupation « .

Ainsi, l’on peut affirmer qu’au terme de l’occupation, l’occupant ne perd pas les investissements qu’il aura fait sur le DPP. Mais, le rachat des ouvrages par l’autorité portuaire n’est qu’une simple faculté laissée à son appréciation.

En Côte d’Ivoire, les articles 31, 32 et 38 de l’ordonnance n*2016-588 du 03/08/2016 portant titres d’occupation du DP ne laissent pas entrevoir cette faculté de rachat des ouvrages construits par les investisseurs privés.

L’on estime qu’il faut reconnaître à l’occupant du DP la qualité de propriétaire des ouvrages qu’il exploite, seulement pendant le temps de l’occupation, sauf à servir le service public  Le droit de propriété ne saurait s’étendre sur le foncier du fait de son inaliénabilité.

Il reviendra au port de préciser lors de la rédaction des titres domaniaux s’ils sont constitutifs de droits réels, droits personnels ou compris dans une concession de service public.

Par Dr Clement Seka ABA, Docteur en Droit Juriste Portuaire et Maritime